Dernier d’une fratrie de six, baccalauréat en poche après huit ans d’internat, Joseph Déchelette rejoint l’entreprise familiale : spécialisée dans le commerce et la fabrication de coton depuis 150 ans.

Commis voyageur durant vingt ans, de la vallée du Rhône au monde méditerranéen, il annote des dizaines de carnets de moleskine, qui nous renseignent aujourd’hui sur la double personnalité de l’homme d’affaire et de l’archéologue, ils sont actuellement encore, conservés au Musée.

En 1892, Joseph Déchelette est nommé conservateur adjoint pour la section archéologique du musée de Roanne. Tout de suite, il fait le constat de l’incommodité matérielle du musée, et de son manque de cohésion scientifique. Le nouveau conservateur répertorie, classe, identifie et prépare une notice pour  obtenir des crédits du Conseil d’Etat.

Tirant parti d’un voyage d’affaires en Egypte en 1893 il acquiert des antiquités. Au second étage de l’Hôtel de Ville, l’ordre règne au musée car il a réorganisé la présentation des collections.

Assuré d’un revenu suffisant et de la bonne marche de l’affaire familiale, il se consacre définitivement en 1899 à l’archéologie. Pour installer une bibliothèque importante héritée de son cousin, il acquiert l’ancien hôtel particulier de Claude Valence de Minardière. Il consacre tout son temps à ses recherches. Esprit curieux et doué, il apprend l’anglais, l’allemand, l’italien, l’espagnol, le portugais, le tchèque, et correspond avec nombre de conservateurs étrangers. Sa réputation européenne est acquise.

Son œuvre scientifique est considérable : environ 170 articles. Son livre majeur est le novateur Manuel d’archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine, fruit d’une quinzaine d’années de recherches.

Malgré cela, vingt ans durant, le musée est toujours confiné à l’Hôtel de Ville et Joseph Déchelette doit se résigner à récupérer une ou deux salles, puis la bibliothèque municipale, ce qui permettra d’obtenir le 20 mai 1911 un remaniement du classement de la septième à la troisième catégorie : « Grâce à ce classement, le musée de Roanne pourra recevoir du gouvernement des œuvres en bronze et en marbre des meilleurs sculpteurs au lieu de recevoir comme auparavant leurs maquettes en plâtre. »

A la déclaration de guerre, Joseph demande la faveur d’être intégré officier dans un régiment territorial et sa requête est acceptée. Lors d’une attaque, il charge sous la mitraille et meurt de ses blessures le 4 octobre.

A 52 ans, avait-il anticipé cette fin héroïque ? Dans son testament il avait prévu de léguer ses collections et sa bibliothèque d’archéologie ainsi que cent mille francs or pour la construction d’un musée, à condition qu’il soit érigé dans un délai de deux ans après l’acceptation du legs. Sa veuve, soucieuse de ses volontés, décide de racheter à ses neveux une part de nue-propriété de l’hôtel de Valence. En 1919, elle offre ce bâtiment à la Ville, se réservant la jouissance d’un appartement au rez-de-chaussée, laissant au premier étage les espaces muséographiques.

La municipalité donne le nom de Déchelette à la rue adjacente et inaugure le nouveau musée en juin 1923. L’œuvre de Joseph Déchelette est enfin totalement accomplie.